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Paul de Boisbrunet vous parle de musique

« Do-Ré-Mi »

« Do-Ré-Mi »

Il est temps pour moi de rendre un hommage mal dosé.

Je repense souvent à mes premières écoutes musicales. L'enfance a une magie particulière qui consiste certainement à ne pas percevoir les limites du monde sensible. En réfléchissant (un peu), il m'a semblé que le temps s'écoulant, les bornes se précisent, le réel gonfle le torse, ce dictateur des perceptions. Il y a là quelque chose de régressif, une dégénérescence. Grandir, c'est oublier d'oublier. C'est toujours un peu artistique une enfance, mais ce n'est certainement pas de l'art. Alors, je campais derrière le poste de radio, cassette dans le lecteur, prêt à enregistrer les derniers morceaux à là mode pour achever une énième « compile de la mort ». Un véritable siège organisé dans ma chambre barricadée et surtout interdite aux adultes (et puis quoi encore!) L'infini gémissement de mes sens en éveil, pour peu de chose finalement.

Heureusement, l'enfance ne fait pas tout, et puisqu'il faut grandir, il faudra bien savoir, et puis juger encore ! C'est vrai !

Vient un air de guitare amplifiée dans mes enceintes Hi-Fi mal réglées et qui crachent leurs brouhaha depuis leur carcasse de plastiques en tout genre maladroitement assemblés quelque part en Chine. Honnêtement, ça a son charme ! J'allais ici et là, piocher des harmonies, des mélodies rebelles, quel bonheur. Demain c'est sur, je dévale les boulevards dans une Mustang noir chromé !

Un jour, je quitte les barricades de ma chambre et je pars en espion dans la discothèque de ma mère, un vieux bac en carton avec des tronches pas possibles, des gros pifs, des clopes au bec et des noms improbables et pas du tout branchés. La partie américaine est plus attirante parce que les noms sont plus « ricains », y'a que des blacks, paraît que c'est ça la soul. Je pioche, on verra bien. Et puis voilà, ça tombe un peu par hasard, j'ai pas bien tout suivi mais on dirait bien que ça vibre en dedans. Voilà que les poils se hérissent maintenant, je vais pas chialer quand même ! Je subtilise quelques exemplaires de ces antiquités. Voyons voir ce qu'il y a plus loin.

Le piano ? Pourquoi pas le violon ? Et pourquoi pas la flute baroque, cet androïde troué qu'on nous impose à l'école, certainement utilisé comme instrument de torture quelque part au Népal, à Ouagadougou ou autre Pétaouchnok! Je prends, faut pas mourir trop con, mais ne comptez pas sur moi pour écouter l'album en entier, y'a quand même des bons trucs à la télé ce soir. Faudrait pas rater.

C'est pas dégueu, ça fait un peu vieillot mais bizarrement c'est plutôt agréable. J'aurais pas parié sur ce Liszt, avec un nom pareil c'était pas gagné.

Soyons clairs, je n'ai jamais arrêté le disque et non seulement le vieux type sur la pochette est devenu un super héros à la Marvel mais toute sa bande de copains dans le même genre a contaminé mon existence de manière fulgurante. Une invasion d'émotions, une hypnose encore ! Le monde que je venais de découvrir était plus vaste, plus somptueux, plus merveilleux et plus excentrique encore que tout ce que j'avais vu.

J'ai même pas 25 ans, et tous les soirs j'ai le cerveau qui danse.

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